Dans le cadre des vendredis intellos organisés par ma copine Mme Déjantée, j’avais envie de te livrer une petite réflexion à partir notamment d’un livre de Pascal Bruckner : La tyrannie de la pénitence, essai sur le masochisme occidental.
Voici un extrait : « Depuis 1945, notre continent est habité par les tourments de la repentance. Ressassant ses abominations passées, les guerres incessantes, les persécutions religieuses, l’esclavage, le fascisme, le communisme, il ne voit dans sa longue histoire qu’une continuité de tueries qui ont abouti à deux conflits mondiaux, autant dire à un suicide enthousiaste. A ce sentiment de culpabilité, une élite intellectuelle et politique donne ses lettres de noblesse, appointée à l’entretien du remords comme jadis les gardiens du feu : « l’Occident » serait ainsi le débiteur de tout ce qui n’est pas lui, justiciable de tous les procès, condamné à toutes les réparations. Dans cette rumination morose, les nations européennes oublient qu’elles, et elles seules, ont fait l’effort de surmonter leur barbarie pour la penser et s’en affranchir. Et si la contrition était l’autre visage de l’abdication ?«
Dans le même ordre d’idées, Albert Camus écrivait déjà en 1948, dans son essai politique Actuelles : « Nous sommes dans un temps où les hommes, poussés par de médiocres et de féroces idéologies, s’habituent à avoir honte de tout. Honte d’eux-mêmes, honte d’être heureux, d’aimer et de créer (…). Il faut donc se sentir coupable. Nous voilà traînés au confessionnal laïque, le pire de tous. »
Personnellement, je partage l’avis de ces auteurs. Je crois qu’il ne faut pas oublier ce qui est arrivé, loin de là, mais qu’il est grand temps d’aller de l’avant et de sortir de l’autoflagellation.
Une prof allemande m’avait confié une fois que son peuple ne pourrait probablement jamais évacuer sa culpabilité existentielle car le nazisme et les camps de concentration étaient dans toutes les mémoires. Aujourd’hui encore, chaque bébé allemand naît avec le poids de ce lourd héritage historique et politique.
On ne peut pas tout oublier, on ne peut pas tout pardonner, mais 65 ans nous séparent de ce conflit. On devrait aussi souligner que les Allemands se sont « rachetés » en reconnaissant les atrocités commises lors de la Seconde guerre mondiale et en favorisant le développement des régimes démocratiques par exemple.
Je parle de l’Allemagne, mais la France et sa politique de colonisation, c’est à peu près du pareil au même. Il y a aussi l’Italie et Mussolini, l’Espagne franquiste…
Merci de ta contribution!! Il est bien intéressant ce billet!! Je ne connaissais pas ce livre mais j'aimerais beaucoup savoir comment ses idées sur la culpabilité se développent…
Le lien avec le thème des Vendredis Intellos apparaît nettement dans l'idée du rôle de l'éducation et l'instruction dans la transmission de cette forme de culpabilité…
Pour info, je te renvoie aussi à la contribution de Mme Faust (qui elle même renvoie à celle de la semaine dernière de C-cilou) qui traite aussi de la culpabilité… mais sur un plan différent!!
A lundi pour débrief!!!
Encore une fois, tout-à-fait d' accord avec toi ! Le devoir de mémoire, ok, c' est une chose importante, mais il faut arrêter l' autoflagélation. Les vieilles hontes, les vieilles rancoeurs, du balai ! Et en avant avec optimisme….
Je suis okay j'aime beaucoup ta réflexion le souci c'est quand on se place du coté des victimes. Oui quand je vois encore aujourd'hui les dégâts collatéraux causés par la politique colonialiste de la France et bien il me semble que le devoir de mémoire ne suffit pas. Oui les descendants des victimes ont la dent dure surtout quand ils subissent encore.
Merci pour vos commentaires !